Sois Belle et tais toi : les puritaines Saintes-nitouches
Bénéficiant d’une plastique idéale avec des formes, des courbes et des proportions frisant la perfection, les premières héroïnes représentent l’idéal féminin bien entendu mais se veulent surtout physiquement réalistes et ordinaires. Se faisant un devoir d’aller dans le sens de la morale, elles portent toujours de longues robes cachant leur anatomie et leurs attributs féminins (poitrine et fessier) ne sont pas prononcés dans l’idée de ne pas inciter à la débauche.
Leur charme et leur sensualité se traduisent surtout dans leurs attitudes, elles sont très posées et maniérées, chacun de leur mouvement est réfléchi, empreint d’une dimension artistique.
Si ces héroïnes profitent d’un physique avantageux, il n’en est rien de leur niveau intellectuel, les pauvres filles en sont réduites au rôle de potiches, sont lunatiques, passives et déphasées (« Un jour mon prince viendra », « Peut-être qu’un jour mon rêve se réalisera »…) mais d’une certaine façon elles représentent un idéal : la parfaite WASP à la peau blanche et à la mise-en-pli nickel, soucieuse d’épouser l’homme parfait, de proliférer et d’entretenir la demeure sans autre forme de procès (Blanche-Neige est présentée pour la première fois lavant la cour du château puis son premier réflexe en arrivant à la maison des nains est de faire le ménage… et elle aime ça si on s’en réfère à sa chanson « Sifflez en travaillant ». Pour Cendrillon aussi, l’existence se cantonne à l’entretien de la demeure et -accessoirement- à l’attente du Prince Charmant).
Pour son retour au conte de fées, Disney mettra en scène dans la « Belle et la Bête » une héroïne de ce type, à la beauté commune (mais pour autant parfaite) et au caractère relativement naïf… toutefois elle s’avérera plus téméraire et déterminée. Par exemple, elle n’attend pas le prince charmant… même si elle en tombe amoureuse malgré elle !
Sommaires
L’érotisme ni vu, ni connu !
C’est à tort qu’on pourrait penser que les premiers Disney des années 30, 40 ou 50 ne dégagent aucune sensualité, que c’est un phénomène entièrement nouveau qui serait apparu dans les années 80 ou 90 ! Blanche-Neige et Aurore possédaient déjà énormément de charme dans leur gestuelle posée mais certaines attitudes qu’elles adoptent sont particulièrement probantes et empreintes de sensualité… voire d’érotisme !
En 1937, Blanche-Neige fuit le vilain chasseur chargé de l’assassiner et s’écroule dans une mare, défaisant ainsi sa mise-en-pli. Les cheveux mouillés et désordonnés, Blanche-Neige casse pendant quelques instants la vision très conformiste qu’on a d’elle.
S’apprêtant à se rendre au bal donné par le Prince, Cendrillon est assaillie par Javotte et Anastasie qui lui réduisent sa robe en haillons… Cendrillon se retrouve alors avec une épaule dénudée (rappelons que nous sommes en 1950, s’en est déjà trop !)…
Dans la liste des faits et gestes quasi-imperceptibles et à connotation sensuelle, on pourrait ajouter une Aurore (la Belle au Bois Dormant) plongeant un pied dans l’eau, une Pocahontas passant une main dans ses cheveux ou une Petite Sirène se mordillant les lèvres. Des petits riens qui font mouche, notamment par la grâce d’une animation de toute beauté.
Exotiques, provocatrices et rebelles… mais où va t’on ?
Si la femme restera gentiment étriquée dans son corset de 1937 aux années 80, celle des années 90 se dira que tant qu’à avoir une plastique irréprochable… autant la mettre au grand jour. Ariel la Petite Sirène ouvrira le bal en ne portant qu’un bikini !
Nous gratifiant d’une jolie danse du ventre, Esmeralda usera également de son charme gitan (sa peau brune ainsi que celle de Jasmine ou de Pocahontas est bien loin de celle blanchâtre qu’arborait Blanche-Neige dans les années 30). De plus, elle fera fantasmer Frollo (c’est l’expression qui convient) car c’est clairement un désir charnel qui est évoqué !!!
Qu’il s’agisse d’une Jasmine se révoltant contre une vie de château qui l’emprisonne ou d’une Esmeralda s’opposant à l’injustice d’un juge persécutant un peuple tout entier, les héroïnes des années 90 sont peu farouches, elles se rebellent, s’opposent au système et aux principes sociétaux établis ! Dans tous les cas, elles sont plus sexy que jamais !
Les femmes au pouvoir !
La nouvelle a eu l’effet d’un holocauste nucléaire dans l’univers du machisme mais c’est une réalité : les femmes ont pris le pouvoir et ont les hommes à leurs pieds !
Jasmine avait tenté une rébellion contre le système mais était vite rentrée dans les rangs, Esmeralda était allée plus loin en se révoltant et s’opposant à l’injustice jusqu’au bout… toutefois Frollo et sa garde étaient parvenus à la mater, à la faire taire ! Ensuite il y eu la sulfureuse Mégara qui n’avait pas la langue de bois et menait véritablement Hercule par le bout du nez !
Et puis un jour, les femmes ont obtenu la place des hommes qu’elles escomptaient tant ! Ce fût incognito dans un premier temps puisque Mulan cachait sa véritable identité lorsqu’elle partait au combat en se faisant passer pour un homme. Mais les choses se sont vite bousculées avec Kuzco où Pacha écoute les bons conseils de sa femme (si si, elle ne sert pas qu’à faire des enfants !). Dans Atlantide, le chef mécano est une femme du nom d’Audrey Ramirez et elle adore taquiner le frêle Milo Thatcher. Quant à Helga Sinclair, il s’agit d’une femme fatale et parée à l’action qui se trouve être le bras droit du commandant Rourke, elle profite d’un physique avantageux à la James Bond Girl mais son charme est vulgaire, à 100 lieues de celui de Blanche-Neige ! Bientôt, nous pourrons découvrir une autre meneuse d’hommes puisque le capitaine du RLS Legacy dans la Planète au Trésor répond au doux nom d’Amélia.
Les Sex-Symbols
Ne se refusant jamais une partie de plaisir, les animateurs ont parfois quitté l’image d’une Blanche-Neige un peu trop naïve et sainte-nitouche pour s’attarder sur des héroïnes flirtant avec les plus grands fantasmes masculins.
Ainsi est née en 1953 (déjà !) la fée Clochette qui allait devenir l’une des grandes icônes de Disney (avec le Mickey en Apprenti-Sorcier). Clochette n’a rien à voir avec ses contemporaines puisqu’elle a les cheveux en bataille et revêt surtout une robe décolletée et très très courte qui lui arrive au dessus des cuisses !
En 1989 dans « Qui veut la peau de Roger Rabbit », Jessica incarne et demeure aujourd’hui encore le plus gros fantasme masculin que le monde de l’animation ai jamais connu. Comprenez, une héroïne au postérieur et aux seins sur-développés avec une imposante chevelure rousse qui vient obstruer son regard de braise tandis que sa robe d’entraîneuse laisse entrevoir ses magnifiques hanches !!! MAMA-MIA !!!
La même année (en 1989 donc), Disney donne naissance à une autre rousse bien peu vêtue puisqu’elle porte en tout et pour tout 2 coquillages : Ariel la Petite Sirène.
Rôle secondaire mais assez marquant dans l’histoire de Disney, Plumette est une femme de chambre dans la Belle et la Bête que Marc DORCEL lui-même n’aurait pas renié. La mademoiselle en question est sexy (décolleté SVP) et adore prendre du bon temps derrière les rideaux avec Lumière… no comment…
En 2001, la sulfureuse Helga Sinclair bénéficie elle aussi d’un charme inédit et plus vulgaire (le grain de beauté près des lèvres notamment). On retiendra d’elle son déhanchement prononcé ou son incapacité -et ce, peu importe la tenue – à conserver ses bretelles sur ses épaules ! Dans la première scène où elle fait son apparition, il était convenu qu’elle relève sa robe le long de sa cuisse… trop osée, l’idée n’a pas été retenue… Dommage !
Les racoleuses
Parce que l’animation d’une Animale (comme les appellent Christian Renaut) permet difficilement de faire passer la sensualité et le jeu de la séduction par la gestuelle, Disney a fait don de grands yeux expressifs surmontés de longs cils racoleurs à certaines héroïnes comme Lady (la Belle et le Clochard), Duchesse (les Aristochats), Bianca, etc.
Certaines comme Peg (la Belle et le Clochard) ou Rita (Oliver et Compagnie) sont également affublées d’un cocard, ce qui leur donne l’image de filles de mauvais genre… ceci dit, elles ont un coeur gros comme ça !
Ce système a également été approuvé pour les personnages secondaires dont le rôle et la présence à l’écran est minimisé comme c’est le cas de la petite fille du Livre de la Jungle qu’on aperçoit à la fin du film : son regard lui donne immédiatement un air aguicheur à l’encontre de Mowgli !
Mères ou Amantes ?
C’est l’histoire de deux êtres tombant amoureux et franchissant les obstacles pour affirmer leur union qui intéresse Disney. Le grand amour trouvé, les personnages sont finis et de manière plus générale, parents et enfants constituent souvent des boulets l’un pour l’autre.
Ainsi, on constatera que la plupart des héros Disney sont orphelins. Si ce n’est pas le cas, leur mère est morte (Blanche-Neige, Cendrillon, Ariel, Belle, Jasmine, Pocahontas, Jane…) ou va mourir (Bambi, Rox) alors que leur père est toujours présent. Si elle a la chance de rester en vie et d’exercer sa fonction maternelle, la mère sera séparée de son petit ou rejetée des autres (Dumbo, Tarzan). Dans d’autres cas, son rôle sera tout simplement minimisé et limité à de la figuration (la mère d’Aurore, celle d’Hercule ou bien encore de Mulan).
En revanche, Pinocchio qui n’a jamais eu de parents biologiques a la chance de trouver un père en la personne de Gepetto qui lui a donné un corps et une mère en la personne de la Fée Bleue qui lui a donné la vie, une âme !
Les choses ne sont pas meilleures quand la mono-parentalité est assurée par la mère. En effet, Jim Hawkins est un délinquant dans « La Planète au Trésor » et le docteur Doppler, ami de la famille, est quelque part un père officieux. Quant à l’autorité que Nani exerce sur sa sœur dans Lilo et Stitch, c’est un fiasco total puisque la DASS est sur le point de retirer Lilo !
Face à ce bilan désastreux, il va sans dire que Disney préfère la femme dans le rôle d’amante, plutôt que dans celui de mère qui est vécu comme une trahison et puni (de mort bien souvent). Seule Chicha (la femme de Pacha dans Kuzco) ou plus récemment Madame Indestructible semblent capables de jongler entre les deux rôles puisqu’elles jouissent d’une véritable complicité aussi bien avec leurs enfants que leur mari. A l’instar de la Fée Bleue qui a coordonné la naissance de Pinocchio avec le père spirituel qu’incarne Gepetto, Chicha a peut être échappé à la mort parce qu’elle porte un enfant (du jamais vu chez Disney !) et prouve ainsi que les bébés ne naissent pas dans les roses et les choux mais par l’union de 2 êtres, une union qui est à son apogée. De même, Duchesse (les Aristochats) est épargnée malgré qu’elle ai déjà eu des enfants en prouvant qu’elle est encore capable de vivre une grande histoire d’amour (avec Thomas O’ Malley). Par là, soulignons que les moeurs ont évolué puisque Duchesse est ici à sa 2ème histoire d’amour (minimum), Pocahontas répètera le même schéma en s’abandonnant réciproquement à John Smith puis John Rolfe… on est bien loin de l’image de la chaste et prude Blanche-Neige. Les temps changent et tant pis si c’est amoral !
Et les méchantes dans les films ?
Elles sont méchantes coûte que coûte mais peuvent être belles ou hideuses !
Je vous l’accorde, elles sont bien plus souvent laides car hormis la belle-mère de Blanche-Neige (qui adoptera l’apparence d’une horrible sorcière tout de même) et Maléfique dans la Belle au Bois Dormant dont la beauté est à la fois parfaite (hautement stylisée), froide et inquiétante, les méchantes sont généralement à faire peur.
A commencer par Madame Mime, Médusa ou Yzma qui sont ridiculisées dans la mesure où elles appartiennent aux plus horribles créations de l’animation et se considèrent comme belles ! Elles passent leur temps à se maquiller (masque aux concombres pour Yzma) et Médusa décroche la palme avec les faux cils, les seins tombant, l’énorme postérieur dont le déhanchement est bien moins gracieux que celui de Helga… Enfin vous voyez le tableau !
Si on résume…
Jadis, on a eu des femmes bien de chez nous (des WASP bien élevées) dont tout le charme résidait dans des gestes gracieux et leur insouciance ! Peu à peu, les femmes ont profité d’une animation moins pointilleuse et se sont comportées plus vulgairement. Dès lors, le sex-appeal des héroïnes a résidé dans leur exotisme (elles viennent de pays hispaniques, d’Extrême-Orient) ainsi que dans leurs revendications, dans leur caractère de battantes et de rebelles !
S’il est agréable de constater qu’elles se servent de leur cerveau et prennent des initiatives, les héroïnes Disney d’aujourd’hui profitent bien entendu d’un physique non désagréable et de formes plus prononcées.
En tout état de cause, les héroïnes représentent toujours les idéaux féminins de leurs époques. La libération des moeurs aidant, les plus grands fantasmes tendent à se concrétiser. On danse sur le fil de la sensualité, on flirte parfois avec l’érotisme… quel exercice périlleux !
Vive les héroïnes Disney !!!